30 novembre 2001
Lintervention dOlivier Lugon a été loccasion
de mettre au point nos connaissances sur le design dexposition.
En effet notre intervenant est spécialisé dans lhistoire
de la photographie et des expositions du début du XXe siècle.
Il est, entre autre, auteur de La photographie en Allemagne, a
participé au hors série Oublier lexposition
dArt Press , ou, plus récemment, au conseil scientifique
de lexposition Made in USA, lart américain de 1908
à 1947.
Ce séminaire nous apporta un foisonnement dobjets de recherches,
et de références dans lhistoire des panoramas, expositions
universelles, expositions commerciales ou historiques, dans les prémisses
aussi du graphisme et de la photographie.
En effet, ce ne sont pas seulement les expositions centrées sur
lart qui firent avancer la pensée du "display",
mais dabord les expositions universelles, scientifiques, historiques,
qui étaient, à lépoque, des véritables
moyens de communication et denseignement. Citons par exemple Road
to Victory, manifestation organisée par Edward Steichen, en
1942 au Museum of Modern Art de New York, qui défend la participation
des Etats-Unis à la 2ème Guerre Mondiale.
Olivier Lugon a mis laccent sur les façons avec lesquelles
on considérait le public durant le XXe siècle, et comment
elles conditionnaient la sélection et les modes de monstration
des objets présentés, souvent avec des visées politiques,
de propagande (commerciale, industrielle ou nationaliste) ou révolutionnaires
(changer les comportements habituels du spectateur). Nous avons perçu,
avec des exemples nombreux et précis, comment un design dexposition
peut devenir un outil politique de manipulation. Le pavillon soviétique
de lexposition Die Pressa (Cologne, 1928), conçu par
El Lissitzky, est révélateur entre autre par lutilisation
de montages photographiques qui saturent lespace, de la démarche
démonstrative dun Etat, à travers les représentations
de sa réussite.
Olivier Lugon a aussi insisté sur la part créative et souvent
expérimentale de ces manifestations. En effet, elles furent le
laboratoire de modes de présentation nouveaux, notamment avec lutilisation
du cinéma, du son, et la conscience de plus en plus aiguë
des possibilités du graphisme comme outil de communication. Lespace
peut être tour à tour théâtralisé, ludique
ou encore interactif. On peut dire, dès cette période, quil
y a bien des auteurs de lexposition, laquelle devient un médium
propice à toutes les audaces.
Par exemple, lAbstract Cabinet du Landesmuseum de Hanovre (1927
et 1928), monté par El Lissitzky, montre des uvres modulables
et manipulables par le spectateur. Ici, en quelque sorte, cest le
visiteur qui doit avoir limpression de modifier laccrochage.
Dans tous ces designs dexposition, le spectateur est rarement pensé
comme un sujet autonome, et on le pense plutôt comme faisant partie
dune masse à éduquer. Un détour vers la photographie
dada a permis à Olivier Lugon de montrer quelques îlots de
résistance, soit parce que cet art considère la technique
(productrice des photogrammes par exemple) comme un moyen de libération
et dappréhension purement subjective, soit parce quavec
des cadrages délirants, le corps du photographe contorsionniste
est pris en compte, refusant apparemment toute forme de sérieux.
Les problématiques que ce séminaire a pu soulever restent
toujours dactualité, et, en parlant de photographie, ou dexpositions
ne montrant pas forcément des travaux artistiques, leurs objets
restent proches des préoccupations contemporaines ou du métier
pratique de commissaire.
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